Sœur Mariette Milot sasv, est décédée le 4 octobre à Nicolet. R.I.P.
Voir ou revoir ici le beau documentaire Je vous salue Mariette
Voici la recension faite par Marco Veilleux et publiée dans la revue RELATIONS de mai 2011.
Elle est reproduite avec les permissions requises.
« Ici soeur Mariette Milot. Je suis actuellement dans l’impossibilité de répondre à votre appel… » Ces mots, enregistrés sur un répondeur téléphonique, pourraient s’adresser à Dieu. En choisissant de les faire entendre à la fin de son documentaire, Pauline Voisard apporte une touche d’humour et d’ironie à l’histoire qu’elle a voulu nous raconter.
Cette histoire, c’est celle de Mariette Milot, 76 ans, membre de la congrégation des Sœurs de l’Assomption de Nicolet. Depuis l’âge de 10 ans, cette femme devenue religieuse entend, au fond d’elle-même, l’appel irrépressible à la prêtrise. Un appel qui s’est d’ailleurs confirmé, au fil des ans, à travers un leadership pastoral exercé en tant que missionnaire au Brésil et, maintenant, dans de multiples engagements sociocommunautaires au Québec. Or, cet « appel », Mariette Milot « demeure dans l’impossibilité d’y répondre ». Et ce, tout simplement parce qu’elle est une femme dans l’Église catholique. Quels sont les arguments du magistère ecclésial pour refuser aussi catégoriquement d’entendre parler de l’accès des femmes aux ministères ordonnés? Comme le rappelle la théologienne Pauline Jacob, interviewée par Pauline Voisard, Rome invoque ultimement « l’argument d’autorité » – le plus faible de tous les arguments théologiques – pour maintenir sa position (voir son livre Appelées aux ministères ordonnés, Novalis, 2007). Pas étonnant que chez bon nombre de chrétiens et de chrétiennes, cet argument peu convaincant ne fasse pas l’unanimité…
Arrivée à la dernière étape de son existence, Mariette Milot doit se rendre à l’évidence : son aspiration à devenir prêtre dans son Église ne pourra se réaliser. Et elle affirme que cela aura été « une des plus grandes souffrances de sa vie ». Et pourtant, elle n’est pas démobilisée ou aigrie. Au contraire, avec ses consoeurs religieuses et des amis prêtres et laïcs, elle s’engage plus que jamais dans des luttes pour la dignité des femmes, les droits humains et l’avancement de la justice dans la société et dans l’Église.
On a souvent demandé à Mariette Milot pourquoi elle demeurait dans l’Église : « Je reste, car pour transformer une institution, il faut être dedans! » On lui a souvent demandé, aussi, pourquoi elle ne s’en allait pas chez les anglicans ou les protestants qui acceptent d’ordonner des femmes. Elle répond : « Si je pars, j’empêche mon Église de faire des pas en avant. » Il faut reconnaître qu’il y a là une force de conviction et une ténacité admirables. Toutefois, on peut comprendre aussi que d’autres catholiques, de guerre lasse, en viennent malheureusement à la décision de quitter le navire… À la fin de ce documentaire, on reste avec cette question lancinante: pourquoi l’Église catholique se prive-t-elle, dans ses ministères ordonnés, de l’apport de femmes comme Mariette Milot? Celle qui s’est battue aux côtés des sans-terre, au Brésil, en connaît long sur la résistance devant le mépris des puissants, l’abus de pouvoir et la répression. C’est dans ce mouvement qu’elle a particulièrement développé son rêve d’une Église et d’une société plus démocratiques et plus solidaires. Avec son documentaire aux allures road movie, il faut savoir gré à Pauline Voisard de nous faire connaître et partager ce rêve…
Oui, je vous salue Mariette, pasteure d’une Église en mouvement.
Marco Veilleux
Source : DVD : Je vous salue Mariette – Réalisation : Pauline Voisard Vidéo-Femmes, 2010, 33 min.
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