Lettre ouverte des femmes évêques catholiques 1.
Au peuple de Dieu, au pape François, aux responsables de la curie, aux conférences épiscopales d’Europe, des Amériques, d’Afrique, d’Asie, d’Australie et d’Océanie.
Les femmes dans l’Église catholique ont senti naître l’espoir lors du Concile Vatican II (1962-1965). Le pape Jean XXIII invitait l’Église à ouvrir ses portes et fenêtres et à « lire les signes des temps ». Plus récemment, lorsque le pape François a lancé un appel en faveur d’une démarche synodale mondiale, nous, les femmes évêques de l’Église catholique romaine, avons à nouveau osé espérer que les dirigeants de l’Église écouteraient et chemineraient avec tout le peuple de Dieu.
Cependant, lors d’une interview publiée en novembre dans le magazine America, le pape François tente encore une fois de justifier l’exclusion des femmes des ministères ordonnés en s’appuyant sur la théologie archaïque et patriarcale selon laquelle Jésus était un homme et n’aurait choisi que des hommes comme apôtres. Par conséquent, les prêtres doivent être des hommes. François ne reconnaît pas les nombreuses fois où, dans les Écritures, des femmes sont choisies par Dieu ou par Jésus pour exercer un ministère. Marie de Magdala a pourtant été proclamée « Apôtre des Apôtres » et une foule d’autres femmes nommées dans les Écritures sont allées proclamer la Bonne Nouvelle dans l’Église primitive. De plus, le pape fait appel à l’imagerie conjugale médiévale d’une relation entre les pôles passivité et activité, où l’Église est l’épouse (passive)et le prêtre l’époux (actif), oubliant le message fondamental de l’Évangile et l’unité baptismale dans le Christ : « … il n’y a plus ni homme ni femme, car vous êtes tous un dans le Christ Jésus » (Galates 3:28). Le baptême repose sur la foi, non sur le sexe, ni sur la nationalité, ni sur aucune autre forme de discrimination.
L’argument selon lequel la masculinité est nécessaire à l’ordination nuit à l’Église et à la société dans son ensemble. Une Église, dont les structures subjuguent les femmes, soutient une subjugation semblable partout dans le monde. Ce faisant, l’Église catholique va à l’encontre de ses propres paroles issues du Concile Vatican II : « Toute forme de discrimination touchant les droits fondamentaux de la personne, qu’elle soit sociale ou culturelle, qu’elle soit fondée sur le sexe, la race, la couleur de la peau, la condition sociale, la langue ou la religion, doit être dépassée et éliminée, comme contraire au dessein de Dieu » (Gaudium et Spes 29). En tentant de justifier l’exclusion des femmes des ministères ordonnés, le pape François manifeste une incapacité à « lire les signes des temps » et à comprendre les droits humains fondamentaux de toutes les personnes membres de l’Église.
Nous, les femmes catholiques diacres, prêtres et évêques des Femmes catholiques romaines, avons répondu à l’appel de Dieu et de nos communautés. Nous sommes validement ordonnées dans la succession apostolique. Nous offrons une expérience vivante et vivifiante de communauté et des sacrements partout où nous vivons. Nous ne sommes pas responsables des personnes qui quittent l’Église; au contraire, nous ramenons plutôt les gens à la foi. Nous aidons à guérir les profondes blessures causées par les abus physiques, émotionnels et spirituels ainsi que par l’exclusion. Nous proposons un modèle d’Église facilement reconnaissable comme étant catholique romaine, mais qui, d’autre part, offre la transparence dans la gouvernance, l’inclusion des personnes marginalisées et la reconnaissance de l’égalité des sexes.
Nous demandons au pape François et aux conférences épiscopales d’Europe, des Amériques, d’Afrique, d’Asie, d’Australie et d’Océanie de nous rencontrer, nous les femmes catholiques romaines qui servons l’Évangile partout dans le monde. Malgré son appel au dialogue, le pape refusera-t-il d’entamer une conversation authentique avec nous? Pourtant, nous reconnaissons qu’il est le gardien de la clé pétrine qui peut nous déverrouiller la porte.
Au nom des femmes catholiques romaines diacres, prêtres et évêques catholiques du monde entier,
+Marie Evans Bouclin, Sudbury, ON, Canada mbouclin@tyenet.com
+Jane Kryzanowski, Regina, SK, Canada photina61@gmail.com,
+Martha Sherman, Washington, IA revmmsherman@gmail.com
+Mary Eileen Collingwood, Cleveland, OH, USA;mecreg6@yahoo.com
+Christine Mayr-Lumetzberger, Pettenbach, Austria;mmcml@almnet.at
+Olga Lucia Álvarez Benjumea, Envigado, Colombia;olalbe@gmail.com
+Jean Marie Marchant, Boston, MA, USA
+Suzanne Avison Thiel, Portland, OR, USA
+Jane Via, San Diego, CA, USA
+Mary Keldermans, Springfield, IL, USA
+Ida Raming, Stuttgart, Germany
+Briget Mary Meehan, Ft. Meyers, FL, USA
+Merlene Olivia Doko, Pismo Beach, CA, USA
+Andrea Michele Johnson, Annapolis, MD, USA
+Sibyl Dana Reynolds, Pebble Beach, CA, USA
+Joan Clark Houk, South Bend, IN, USA
+Patricia Fresen, Johannesburg, South Africa
+Nancy Louise Meyer, Brownsburg, IN
+Gisela Forster, Berg, Germany
1 Note du CA de Femmes et Ministères
Le Conseil d’administration de Femmes et Ministères a pris connaissance de La lettre ouverte des femmes évêques catholiques adressée au peuple de Dieu, au pape François, etc.
Comme vous le savez sans doute, l’Église catholique ne permet pas aux femmes d’être ordonnées. Le Vatican considère l’ordination des femmes comme un crime grave en droit canonique, passible d’excommunication. Jean-Paul II, prédécesseur de Benoit XVI, avait affirmé dans la Lettre Apostolique Ordinatio Sacerdotalis en 1994 que l’Église n’a en aucune manière le pouvoir de conférer l’ordination sacerdotale à des femmes et que cette position doit être définitivement tenue par tous les fidèles de l’Église. À son tour le pape François réitère la même position avec encore plus de force. En effet, il approuve une version révisée du code de droit canonique entrée en vigueur le 8 décembre 2021, juste avant la tenue du prochain Synode, qui criminalise explicitement au Canon 1379 le fait de conférer les ordres sacrés aux femmes ou de tenter de le recevoir. La peine encourue est latae sententiae : un terme juridique qui signifie qu’elle est encourue automatiquement.
Malgré ces interdictions, des femmes continuent à questionner et à défier l’Église catholique romaine en participant à des ordinations non autorisées et en exerçant le sacerdoce. Ces dernières appellent le pape François à une conversation authentique avec elles, reconnaissant qu’il est le gardien de la clé pétrine qui peut déverrouiller la porte.
- Communication de laRoman Catholic Womenpriests - 24 janvier 2023