D’abord, j’accepte que la Vierge Marie a joué un rôle irremplaçable et unique dans l’histoire du salut de l’humanité, en mettant au monde le Fils de Dieu . Elle devient, pour moi, une inspiration, au moment où elle adhère à la volonté de Dieu sur sa vie. Son attitude est avant tout celle de se laisser aimer et d’aimer. À noter que cela revient autant à l’homme qu’à la femme. En effet tous les deux disent dans le Pater : « Que ta volonté soit faite».
Mais je ne peux pas accepter que Marie, Vierge, c’est-à-dire un femme présentée sans aucune référence à son sexe, nous soit donnée ainsi comme modèle, comme c’est le cas aujourd’hui en notre Église : ce qui est très bien démontré dans le volume que nous avons lu en groupe de partage.
D’où mon souhait qu’en Église un travail de réflexion se fasse pour découvrir Marie la Femme, la personne humaine, sexuée, en chair et en os. Malgré sa virginité, elle est une femme qui a été confrontée aux difficultés, grandes et petites, reliées à la condition humaine. Autrement dit, elle a vécu, en ayant les deux pieds sur terre. Pour paraphraser une expression du pape François, sa condition de créature de Dieu bien ajustée à la nature humaine a eu comme conséquence qu’elle « a été imprégnée de l’odeur des brebis ».
Oui, rien ne m’empêche de penser que, comme toute épouse, elle a eu des relations sexuelles avec son bien-aimé Joseph. Elle s’est inquiétée du sort de son jeune enfant : elle a dû dialoguer avec son époux au sujet son éducation et de son avenir. Elle a dû planifier son budget et prévoir ainsi avec Joseph, leurs revenus et leurs dépenses pour subvenir adéquatement à leurs besoins personnels et familiaux et ce, quotidiennement.
Et une fois Joseph décédé et Jésus parti sur les routes avec sa « troupe d’amis », elle s’est questionnée sur le sort de son fils. Sans doute comme toutes les mère, elle a été assaillie d’une inquiétude constante à partir du moment où Jésus, menacé de mort, a dû se protéger en se cachant et ce, jusqu’au moment où elle se retrouve au pied de la croix « le cœur transpercé de douleur » assistant impuissante au rejet et à la mort de son fils.
Les propos du Christ rapportées dans les textes de nos évangiles ne coïncident pas, à mon avis, avec le comportement actuel de l’Église envers les femmes.
Jésus n’accepterait pas que les femmes d’aujourd’hui, comme celles d’hier, soient confrontées à un modèle de femme, vierge, asexuée, inimitable. En ce sens, il faut, de toute évidence, mettre les points sur les « i » concernant le langage officiel de notre Église sur la l’Être, la place et le rôle de la femme au sein de notre institution et rectifier les propos contradictoires, négatifs, asservissants, particulièrement dans les discours ou homélies de nos derniers papes.
« La charité nous presse », il serait URGENT de sensibiliser, au moins, nos évêques à cette injustice et à chercher avec eux, des moyens de changer le paradigme des relations hommes-femmes ( pouvoir/soumission) en Église. A ces évêques pourraient s’adjoindre des hommes et femmes qui pourraient apporter leur point de vue de laïques sur ce sujet : peut-être pourrait-il sortir de ces assises des propos renouvelés sur le rôle de la femme et aussi de l’homme en Église?
Encore une fois, la lecture de la vie et la mort du CHRIST révélée, méditée, nous amène à découvrir la cohérence entre la vie charnelle de Jésus selon la volonté de son Père. Cette cohérence est basée sur une liberté, véritable liberté : liberté de choix (tentation ), liberté de parole ( annonce de la Parole à tout venant), liberté d’action, (prière et présence aux pauvres, aux pécheurs et aux femmes), liberté de donner sa vie par amour, d’où sa frayeur, son angoisse et son cri devant cette réalité de sa mort inhérente à toute vie humaine.
Il me semble que la méditation de l’événement de la mort du Christ Jésus constitue , pour nous, un appel ou un rappel de la nécessité de libérer la Parole, en Église, en favorisant des lieux de partage. Inspirée par le VERBE fait CHAIR, autant en Marie qu’en Jésus, notre Église pourrait développer un langage plus évangélique, plus humain sur la réalité corporelle, sexuelle et spirituelle des femmes. « Notre Église » ici ne vise pas seulement la hiérarchie, mais aussi les prêtres, les diacres, les agents et agentes de pastorale et toutes les personnes présentes dans quelques postes décisionnels.
Ce sera tout un défi de susciter, sinon de provoquer parfois, cette prise de conscience visant à rétablir la justice envers les femmes au sein de notre vie ecclésiale. Fort probablement , il faudra commencer par pointer et inviter les personnes plus susceptibles d’entendre le cri des femmes, en vue de contribuer à un changement de mentalité et à une prise de parole favorisant la mise en place de moyens de traiter nos sœurs en humanité avec dignité à partir de leur être. Ce qui implique, de façon urgente, la mise en place d’un processus décisionnel en vue d’établir, une fois pour toute, l’ÉGALITÉ HOMME-FEMME dans une Église en service.
En terminant, je ferai tout mon possible pour me rendre disponible à tout projet-action qui favorisera le respect de l’être de la femme, la recherche de sa place et de son rôle spécifique au sein de notre Église.
Je mets cette démarche sous l’inspiration de sainte Marie-de-l’Incarnation.
En toute simplicité et solidarité
Roger Labbé, prêtre.
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