Oui, je suis un homme et en plus un prêtre de l’Église catholique et j’étais présent au Rassemblement de Rimouski, conclusion de la marche des femmes 2010. Comme cet événement avait lieu un dimanche, j’ai pu être présent au rendez-vous, grâce à la collaboration, à la compréhension et à la solidarité de mes confrères prêtres qui ont assumé ma part de ministère dominical.
Qu’est-ce qui m’a fait marcher?
Cette activité se tenait le 17 octobre, journée internationale du refus de la misère, laquelle touche majoritairement des femmes. Au début des années 1980, j’ai été aumônier de l’AFÉAS, région Québec et ce, pendant 6 ans. J’y ai découvert de l’intérieur la sensibilité des femmes à l’injustice, leur appel au respect, leur désir de s’épanouir comme personne autonome, leur intelligente analyse de la société et leur capacité d’organisation. Je me suis mis en mode écoute. J’ai vu la description d’injustice qui perdure, j’ai entendu des cris de révolte et j’y ai rencontré des femmes de plus en plus conscientisées, engagées, solidaires.
En ce dimanche 17 octobre 2010, la Parole de Dieu nous invitait à ne pas baisser les bras, à continuer la lutte. Les mots « prier » et « crier » devenaient synonymes. La marche des femmes constituant pour moi, un lieu d’actualisation de l’appel du Seigneur.
J’ai une profonde admiration et un respect pour les femmes qui ont une «foi à transporter les montagnes». Grâce à leur ténacité et à leur solidarité, elles ont une capacité de marcher même si elles rencontrent des embûches, des obstacles. C’est pour moi un mouvement irréversible et une interpellation à l’action.
J’aime me rappeler ces exemples de courage; celui des grands-mères de mai en Argentine; celui des Afghanes voilées qui, en cachette, au risque de leur vie, assurent une éducation à leurs jeunes concitoyennes. et que dire de la nomination récente de la jeune mère de deux enfants, comme chef de police à Ciudad Juarez, au Mexique. Elle est au cœur de la lutte violente du Cartel de la drogue. Son prédécesseur a été assassiné au cours de l’été dernier. Elle désire laisser à ses enfants une société plus sécuritaire.
Et je passe sous silence toutes ces femmes qui s’engagent au quotidien à la lutte contre la pauvreté et l’injustice.
Je suis sensible, en particulier, à la violence faite aux femmes: violées comme armes de guerre, abusées de toutes sortes de façons … au quotidien. Je comprends leur révolte de ne pas avoir l’équité salariale pour un travail et des compétences égales. Parfois, je me dis que si les hommes vivaient au quotidien ces nombreuses violations des droits des femmes, il y a longtemps que nous aurions vécu une révolte sanglante.
De prime abord, je ne suis pas d’accord avec toutes les revendications féminines, en particulier celles qui concernent l’avortement et les travailleuses du sexe. Mais encore là, au-delà des principes, je me situe au niveau des situations de personnes, de souffrances dans lesquelles je m’efforce de faire une lecture teintée du respect de la dignité de la personne.
Revenant à mon expérience du Rassemblement à Rimouski, je tiens à faire deux constats. Premièrement, j’ai marché avec des femmes heureuses d’être ensemble, des femmes solidaires des plus démunies, des femmes fières, déterminées à faire « bouger les choses ». De plus, j’ai pris conscience de la mondialisation de ce mouvement. Les liens avec les femmes africaines rassemblées, au même moment, à Bukavu, m’ont vivement rappelé que ce Mouvement est mondial. Ce partage d’espoir d’un monde meilleur sans pauvreté et sans violence est une contribution à l’histoire de l’humanité.
Enfin, je me dois de reconnaître que cet appel historique lancé aux leaders de la société civile concerne aussi mon Église catholique dans laquelle je suis engagé par un ministère ordonné.
J’ai conscience que j’ai des pas à faire pour répondre à ces justes revendications lancées par ce mouvement mondial qui a des retombées quotidiennes dans ma propre cour.
Comme homme et comme prêtre, je fais de mon mieux pour bien comprendre ce que veut dire la montée de l’humanité et je soutiens humblement des organismes, mouvements ou projets qui viennent en aide aux femmes.
Pour moi, le rassemblement de Rimouski a été l’occasion pour les femmes, accompagnées de quelques hommes, de regarder ensemble dans la même direction, là ou point la lumière teintée de respect, de justice, d’égalité, de solidarité.
De retour chez moi, j’ai noté dans notre feuillet paroissial : « Au rassemblement de Rimouski, elles étaient 10 000 marcheuses, sans compter les hommes et les enfants ».
Solidaire, en marche pour mieux comprendre et agir en conséquence.
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