GRAVEL, Claude, La féministe en robe noire, Mère Sainte-Anne-Marie, Libre Expression, 2013, 224p.
Recension par Léona Deschamps
En 2013, l’ex-journaliste Claude Gravel publie La féministe en robe noire, Mère Sainte-Anne-Marie. L’auteur y présente l’action de cette soeur de la Congrégation Notre-Dame comme religieuse, comme femme et comme féministe à une époque où l’on était réfractaire à l’idée de faire instruire les jeunes filles. Entre l’Introduction « Voilà un homme » et l’ « Épilogue », neuf chapitres constituent cette biographie écrite comme un récit. L’espace limité nous force à faire un choix et à en laisser quelques-uns entre parenthèses.
Née à Saint-Paul-d’Abbotsford le 15 octobre 1861, de Louis Guillaume Bengle, cultivateur et soigneur de chevaux. et de Philomène Pion, ex-institutrice, Marie-Aveline est l`ainée de cinq autres filles. Toutes grandissent sous l’influence de mémère Lippé conteuse d’histoires, « tireuse » et joueuse de cartes.
À dix-huit ans, Marie-Aveline connaît la vie de centaines de jeunes filles enseignant au Québec en 1879-1880. Après une année d’enseignement dans le rang qui l’a vue grandir, elle arrive à la maison mère de la Montagne pour y suivre la Formation stricte du postulat et du noviciat dans la Congrégation Notre-Dame, ce qui la conduira à agir dans le secteur de l’éducation comme enseignante, puis comme directrice et surtout comme promotrice des études supérieures pour les jeunes filles.
En juillet 1904, son projet soumis à l`approbation du Comité catholique du Conseil de l’Instruction publique, soit la création du premier collège classique pour jeunes filles dans la province, fut rejeté. Soeur Sainte-Anne-Marie ne se décourage pas, elle prépare une équipe d’enseignantes sachant que le Comité protestant autorise déjà l’ouverture de collèges de langue anglaise menant aux études universitaires. Enfin, le 8 octobre 1908, le vice-recteur de l’Université Laval de Montréal, Monseigneur Gaspard Dauth, préside l’ouverture officieuse du premier collège féminin québécois où l’on doit cependant « étudier à la manière des hommes ».
Deux décennies plus tard, nommée maitresse générale des études de sa communauté tout en demeurant directrice de son École d’enseignement supérieur, sœur Sainte-Anne-Marie milite en faveur de la construction de l’Institut pédagogique pour une formation plus complète des institutrices. Le 8 octobre 1925, son ami Mgr Georges Gauthier, assisté d’officiels, bénit la pierre angulaire.
Le 15 octobre 1936, l’âge et la maladie rattrapent Mère Sainte-Anne-Marie. Tout se précipite à la fin de février l937. Et le 13 mars, elle quitte la terre, sereine et reconnaissante. Des témoignages de sympathie arrivent du Québec, du Canada, des États-Unis et de l’Europe.
À l’occasion du cinquantenaire du Collège Marguerite-Bourgeoys, d’anciennes élèves projettent d’honorer de façon particulière mère Sainte-Anne-Marie par l’apposition d’une commémorative dans l’église de son baptême, à Saint-Paul-d’Abbotsford, mais par la suite l`évêque exige l’enlèvement de l’inscription souvenir…
La lecture de la biographie de Claude Gravel « La féministe en robe noire Mère Sainte-Anne-Marie » s’avère stimulante pour les membres de l’ARDF qui retiennent la valeur égalité dans leur plan d’action 2012-2015, ainsi que pour toutes les féministes d’aujourd’hui. De plus, l’ouvrage demeure fort intéressant pour toutes les personnes avides de connaître les contextes historiques (sociaux, politiques, scolaires et ecclésiaux) entourant l’oeuvre promotrice de la libération intellectuelle des Québécoises. On termine cette lecture avec un grand sentiment de fierté.
Recension publiée dans la revue Reli-femmes No 79 – Novembre 2013
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