Une recension du livre de Pauline Jacob
Appelées aux ministères ordonnés
Ottawa, Novalis, 2007, 275 p.
par Édith Richard
La directive était nette, absolue et sans appel : « Le débat sur l’ordination sacerdotale pour les femmes est définitivement clos ». (Ordinatio sacerdotalis 1994)
Et pourtant!…
La recherche théologique sur le sacerdoce pour les femmes se poursuit toujours nonobstant l’arrêté du magistère. Ça prend tout de même du courage, de la détermination et, admettons-le, un certain toupet pour ainsi défier l’interdiction vaticane.
Pauline Jacob a relevé ce défi. Dans la foulée de sa recherche doctorale, elle nous présente les témoignages de 15 femmes qui disent ressentir un appel au ministère sacerdotal ou diaconal. Témoignages confirmés par 73 témoins vivant un lien pastoral, professionnel ou communautaire avec ces femmes.
Ce qui est remarquable dans ce livre, c’est l’originalité de la démarche. Il s’agit de L’APPEL. Il fallait y penser. Selon l’institution ecclésiale, « seul l’homme (vir) est appelé par Dieu à la prêtrise » mais non les femmes. L’Esprit-saint serait-il sexiste? L’auteure nous fait connaître des femmes qui n’entendent pas se laisser définir par le droit canon mais plutôt par rapport à elles-mêmes, de ce qu’elles ressentent au plus profond de leur être. Elles reconnaissent qu’elles sont l’objet d’une élection, d’une distinction, d’une aspiration venant de l’intérieur qui s’impose à la volonté et pousse à l’action. Elles se sentent appelées, elles le disent, elles le vivent. À l’aide d’un parcours ignatien, l’auteure exploite « un filon peu développé, celui du discernement vocationnel que ces femmes se sont donné pour en arriver à une telle certitude du cœur».
Dans un bref rappel historique, l’auteure observe une étonnante convergence des arguments avancés pour ou contre l’obtention du droit de vote des femmes au Québec et ceux invoqués aujourd’hui pour ou contre l’admission des femmes au ministère sacerdotal ou diaconal et cela tant « sur le plan de l’intégration sociale que sur le plan de la conception de l’être humain et sur le plan des rôles et des fonctions ». En fait, le débat s’articule autour du binôme public/privé. Aux hommes, la sphère publique, lieu du verbe et de l’action; quant aux femmes elles sont assignées à la sphère privée lieu de la vie, de l’amour et de la famille. Dans un enchaînement cohérent, une certaine place leur est accordée dans l’Église mais dans une fonction de service sous l’égide d’une direction cléricale.
On trouvera dans ce livre une abondante matière à réflexion. Tout n’a pas encore été dit. Les témoignages de ces femmes nous concernent et nous interpellent; de plus nous partageons leur souffrance du fait que l’Église n’accepte pas ni de reconnaître leur vocation ni de les écouter.
Catherine de Sienne, docteure de l’Église, était aussi interpellée par les problèmes de l’Église.
Au pape Urbain VI , elle écrivait audacieusement ceci : « Votre autorité s’étend à tout; mais votre vue est bornée comme celle de l’homme (…) Je sais que Votre Sainteté désire ardemment avoir des prêtres qui puissent la servir, mais il faut pour cela les écouter avec patience ».
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