Depuis le commencement du pontificat du pape François, il y a eu de nombreux signes d’espoir pour les femmes, surtout pour les femmes catholiques qui sont engagées dans l’Église et qui demandent à être considérées comme des personnes humaines et des agentes de leur propre identité.
Le Jeudi saint 2013, nous avons vu François laver les pieds des femmes, même si la règle dit qu’on ne doit laver les pieds que des viri, ce qui veut dire, des êtres masculins.
François a répété régulièrement qu’il voudrait embaucher encore plus de femmes au Vatican, dans des fonctions qui ne demandent pas l’ordination. À ce moment-ci, les femmes occupent 4% des fonctions de leadership de haut niveau dans les secrétariats, les congrégations et les conseils pontificaux du Vatican.
En mars 2015, le Conseil pontifical de la culture a discuté d’égalité et de différences dans les cultures des femmes d’aujourd’hui à partir d’un texte préparé par un petit comité de consultantes. Le 8 mars, un colloque de femmes « Voices of Faith [Voix de foi] » a eu lieu à l’intérieur des murs du Vatican.
La semaine dernière, nous avons reçu la bonne nouvelle que l’enquête sur des religieuses américaines par la Congrégation des religieux du Vatican est terminée. François lui-même apparaît dans une photographie, assis à la table avec les leaders du Leadership Conference of Women Religious [Conférence du leadership de la vie religieuse féminine] [LCWR] des États-Unis .
Mais je dois dire honnêtement que tout ça me fait penser au titre d’un roman de Richard Fariña Been Down So Long, It Looks Like Up To Me (1966), titre qui peut être traduit ainsi : « J’ai été en panne si longtemps, que ça me semble des progrès. »
Ceci veut dire que même des progrès tout à fait microscopiques ressemblent à de grandes étapes alors que, d’aussi longtemps que nous pouvons nous en souvenir, nous n’avons eu presque aucune reconnaissance de notre dignité et de notre égalité.
Récemment, François a caractérisé la théorie du genre comme la négation des différences entre les femmes et les hommes. Pour lui, cela fait partie « du problème et non de la solution. » C’est clair que, pour lui, la « femme » fonctionne comme un absolu et le mot « femme » représente une catégorie juridique plutôt qu’une gamme d’identités corporelles ou psychologiques; des identités aussi riches et aussi diverses que les individus eux-mêmes.
À mon avis, nous ne verrons aucun progrès réel et sérieux avant de déconstruire le dualisme qui reste à la base de tout discours officiel concernant le rapport homme-femme et, en plus, de démythologiser la catégorie « femme ». Ça exigerait un discours dirigé par des femmes qui parlent avec autorité. Mettre l’accent sur les « voix » des femmes dans l’Église ou promouvoir un élargissement des « rôles » joués par des femmes dans l’Église ne suffit pas face à la demande éthique liée à la dignité donnée aux femmes chrétiennes par leur baptême. L’un est une question de pratique, l’autre une question d’être.
Pour conclure, laissez-moi parler non plus comme une blogueuse invitée, mais comme une théologienne. François a dit, probablement avec un sourire et assez de bonne volonté, que l’Église catholique a besoin d’une théologie de la femme et que les théologiennes catholiques sont « les fraises sur le gâteau » de la théologie aujourd’hui. Avec tout mon respect, Monsieur, non, nous ne sommes pas des fraises. Nous sommes le gâteau. Pas exclusivement, mais inclusivement. Pas moins que nos collègues et frères théologiens. Nous faisons la théologie parfois, ou souvent, autrement – et personne ne connaît encore le résultat final. Nous faisons la théologie qui prend des formes diverses selon des expériences de vie que nos frères ne peuvent pas imaginer. Et nous faisons la théologie poussées par un espoir quasi eschatologique d’un avenir où même « les femmes » parlent avec autorité, dans, pour, et au nom de notre propre Église.
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Super, bravo pour toute ces démarche, j’aime beaucoup vous lire et parfois cela me fais sourire.
Dans votre article, intéressant et nuancé, vous avez une formulation malheureuse qui me semble opposer un absolu à celui du pape. « Nous sommes le gâteau » est tout autant exclusif… Ce que je comprend, considérant la nécessité d’un discours libérateur. Mais, ne devrait-on pas dire « Nous sommes ensemble le gâteau » ou « Nous sommes une partie intégrante du gâteau ».
Cela dit, un grand merci pour votre article.
Quel article rafraichissant, en effet. Le gâteau aux fraises, c’est un des charmes savoureux du printemps. Oui, nous sommes ensemble, bien au-delà de notre genre, nous sommes et le gâteau et les fraises. Savoureux gâteau! Délicieuses fraises, peu importe le genre de l’un et de l’autre!
Dans d’autres textes, j’entends moi aussi que notre si bon Pape François n’a pas encore intégré dans son vocabulaire (!) le terme «égalité» qui comporte nécessairement le va-et-vient de la réciprocité entre des êtres humains égaux en toute objectivité de la divine création.
Voilà, triste à souhait. C’est pas mal plus difficile, semble-t-il, que de faire bouger la Curie!