Le 11 mars dernier, Gisèle Turcot, sbc, a participé au panel qui a suivi la présentation du film GRÂCE RADICALE (original américain: Radical Grace) qui était présenté à la clôture du Festival des Filministes à Montréal.
Commentaire sur le film Radical Grace de Rebecca Parrish (2015)
Par Gisèle Turcot, sbc,
membre du panel suivant la présentation au
Festival des Filministes, Artgang, 6524 rue St-Hubert, Montréal, le 11 mars 2018
Américaines et religieuses, ces femmes que Rebecca Parrish a choisi de suivre sont bien en chair et en os. Leur combat pour la justice sociale illustre la démarche d’analyse systémique à partir de l’option pour les pauvres qu’elles ont décidé d’utiliser pour actualiser leur mission dans un monde qui génère tant d’inégalités. Rien de surprenant que leur vision de la personne humaine et des transformations sociales se heurte à des obstacles tant dans l’arène politique qu’au sein de l’Église.
Ce virage, la grande majorité de la population l’a compris, comme le démontrent les séquences du film montrant des manifestations organisées partout, y compris dans les paroisses, pour défendre « les sœurs » qui étaient soudainement semoncées par le Vatican.
Le film évoque deux types d’examen : l’enquête sur le style de vie des sœurs américaines déclenchée par la Congrégation pour les Instituts de vie consacrée et des Sociétés de vie apostolique, enquête dirigée vers les congrégations; et en 2012, la mise en tutelle de l’association des leaders/supérieures des congrégations, la Leadership Conference of Women Religious (LCWR). Cette association compte 1350 membres, des femmes hautement scolarisées qui représentent environ 80 % des 49 000 religieuses appartenant à des fondations américaines.
Le décret que la Congrégation des évêques, à Rome, avait transmis à la Conférence des évêques américains ne devait pas être connu du public. Mais la nouvelle s’est répandue à la vitesse d’un éclair jusque dans un éditorial du New York Times et plusieurs périodiques de la gauche chrétienne (Sojourners, Commonwheal, etc.).
J’apprécie le fait que la réalisatrice nous permette d’apercevoir le combat intérieur de ces femmes qui peinent à réconcilier leur expérience de la condition humaine et leur compréhension de l’Évangile avec le conservatisme doctrinal et moral de leur Église. Qu’elles visitent des prisonniers ou s’acharnent à sauver un projet de loi en santé publique, les religieuses américaines représentent, au dire des journalistes, ce qu’il y a de meilleur dans le catholicisme aux États-Unis, Alors pourquoi les mettre en tutelle? C’est contre-productif!
En s’adressant à toute l’assemblée, en août 2012, la Présidente de la LCWR avait intitulé son allocution : « Comment naviguer à travers les récifs? » Son discours est un chef-d’œuvre de lucidité et de profond enracinement dans une foi intelligente et compatissante. La mise en tutelle devait durer cinq ans, elle a été résolue en trois ans. En s’affirmant avec dignité, en adoptant une stratégie de dialogue, que je qualifierais de nonviolente, la LCWR a choisi de ne pas éviter d’affronter les changements que toute l’Église catholique romaine est appelée à envisager.
La reconnaissance de la contribution des femmes à tous les niveaux de la vie et de la mission de l’Église est à l’ordre du jour au moins depuis le Concile Vatican II (1962-1965) comme l’a relevé l’ancienne présidente de l’Irlande, Mary McAleese, le 8 mars 2018, lors d’un événement annuel organisé par Voices of Faith :
« Imaginez le scénario suivant : le pape François convoquerait un Synode sur le rôle des femmes; alors 350 hommes célibataires conseilleraient le pape sur ce que veulent les femmes? Notre Église est devenue ridicule à ce point. Pendant combien de temps encore la hiérarchie pourra-t-elle soutenir la crédibilité d’un Dieu qui veut cet ordre des choses, une Église où les femmes sont invisibles et sans voix au niveau du leadership dans les discernements et les décisions sur des questions légales et doctrinales? Il est temps que ça change. The time is NOW! » (original anglais cité plus bas)
Il convient de rappeler ici que des évêques de chez nous ont porté cet appel à Rome spécialement depuis 1971. Par exemple, en 1987 – il y a 30 ans – Mgr Jean-Guy Hamelin avait affirmé : « Si l’on ne recherche pas activement des moyens d’assurer une représentation équitable des femmes et des hommes à tous les niveaux de la vie ecclésiale, c’est la crédibilité même de l’Église qui sera atteinte.»
Je souhaite que ce film documentaire devienne un puissant outil pour faire entendre la voix des femmes engagées dans les luttes pour un monde plus juste au nom des valeurs de l’Évangile et de leur appartenance à une Église qui tarde à les reconnaître pleinement.
Texte d’abord publié sur le site de l’Institut Notre-Dame du Bon-Conseil et publié avec les autorisations requises.
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Bonjour,
J’aime beaucoup : » the time is NOW » dans cet article.
La plus grande action que l’Église catholique romaine pourrait faire dès maintenant, semaine où les pasteurs chiliens ont remis leur demission au Vatican en masse:
– Une Réforme de l’Église catholique romaine sous les trois (3) axes suivants:
«Semences organisationnelles et théologiques pour la Réforme de l’Église catholique romaine»:
I) La ré-insertion des ministères féminins comme au Ier millénaire chrétien;
II) La ré-instauration du libre choix en matière d’abstinence; et
III) La décentralisation du pouvoir ecclésiastique avec diminution de niveaux hiérarchiques pour un accès plus direct à Dieu.
Graduée en théologie,
Postulante au baccalauréat en théologie/sciences des religions/gérontologie
Université Laval
Je termine mon baccalauréat en théologie/sciences des religions/gérontologie présentement avant d’entreprendre ma maîtrise en ce sens. Je suis toujours à la recherche de groupes travaillant pour l’intégration des femmes au sein de la Grande Église chrétienne.